mes vies

blog multidirectionnel : mes vies de mère, de prof, de musicienne, de lectrice, de promeneuse, de dilettante en tout et spécialiste en rien… Et même mes vies de cuisinière, couturière et tricoteuse !

 

amour, amour, je t’aime tant, je t’aime tant…

Il m’est tombé par hasard sous les yeux, et aussitôt, dans ma besace, ce “folio 2€” qui reprend les principales lettres de la correspondance Sand/Musset. À l’époque (en licence ? ou en maîtrise ?) où je lisais Consuelo, La Comtesse de Rudolstadt, Elle et Lui, j’avais eu le projet de lire la correspondance de Sand, puis j’étais passée à autre chose.

Et donc, là, une après-midi ensoleillée et la perspective de la rentrée qui me pousse à profiter encore et encore du jardin, du transat… Et les amours déjantées des “enfants du siècle”.

Peut-on encore écrire des lettres d’amour ? Peut-on encore parler d’amour, après ça ??

C’est George, (forcément), qui dans ses lettres parle le mieux de l’autre, de leur amour, et de l’Amour “tout court”…

Voyez donc :

L’amour est un temple que bâtit celui qui aime à un objet plus ou moins digne de son culte, et ce qu’il y a de plus beau dans cela, ce n’est pas tant le Dieu que l’autel. Pourquoi craindrais-tu de te risquer ? Que l’idole reste debout longtemps ou qu’elle se brise bientôt, tu n’en auras pas moins bâti un beau temple. Ton âme l’aura habité, elle l’aura rempli d’un encens divin, et une âme comme la tienne doit produire de grandes œuvres. Le Dieu changera peut-être, le temple durera autant que toi. Ce sera un lieu de refuge sublime, où tu iras retremper ton cœur à la flamme éternelle, et ce cœur sera assez riche, assez puissant pour renouveler la divinité, si la divinité déserte son piédestal. Crois-tu donc qu’un amour ou deux suffisent pour épuiser et flétrir une âme forte ? Je l’ai cru aussi pendant longtemps mais je sais à présent que c’est tout le contraire. C’est un feu qui tend toujours à monter et à s’épuiser. Peut-être que plus on a cherché en vain, plus on devient habile à trouver; plus on a été forcé de changer, plus on devient propre à conserver. Qui sait ! C’est peut-être l’œuvre terrible, magnifique et courageuse, de toute une vie.

[…]

T’ai-je dit que j’avais fait mes adieux à l’enthousiasme ? Si je l’ai dit j’ai voulu parler de cet enthousiasme des premières années de la carrière, qui a besoin d’être si ardent pour en couvrir les difficultés. Cette force que j’avais pour fermer les yeux afin d’y conserver le rayon de mon soleil, alors même qu’il s’éteignait, je n’en ai plus besoin. Je contemple, les yeux toujours ouverts, une lumière toujours éclatante et pure.

Une autre lettre, six mois plus tard :

 

…tu es jeune, tu es poète, tu es dans ta beauté et dans ta force. Essaye donc, moi je vais mourir. Adieu, adieu, je ne veux pas te quitter, je ne veux pas te reprendre, je ne veux rien, rien, j’ai les genoux par terre, et les reins brisés, qu’on ne me parle de rien. Je veux embrasser la terre et pleurer. Je ne t’aime plus, mais je t’adore toujours. Je ne veux plus de toi, mais je ne peux pas m’en passer. Il n’y aurait qu’un coup de foudre d’en haut qui pourrait me guérir en m’anéantissant. Adieu, reste, pars, seulement ne dis pas que je ne souffre pas, il n’y a que cela qui puisse me faire souffrir davantage, mon seul amour, ma vie, mes entrailles, mon frère, mon sang, allez-vous-en, mais tuez-moi en partant.

 

Bien sûr, ils ont la conscience de “faire œuvre” avec chacune de leurs lettres, qu’ils se reprennent à chaque rupture, qu’ils caviardent après-coup, raturent et corrigent… Comme tous ces artistes romantiques dont la vie est un des aspects de l’œuvre… Et si, “en creux”, cette correspondance dessine une relation faite de jalousie, de disputes, d’infidélités, de dépression et de crises délirantes, elle n’en reste pas moins digne de figurer au panthéon des plus belles histoires d’amour.

 

(2 euros pour deux ans d’une folle passion, c’est bradé…)

Categorie : livres
Par mes vies
Le 30 août 2011
A 15:19
Commentaires : 0
 
 

hard-boiled

Il est moche (enfin c’est lui qui le dit), mais il tombe une femme par épisode. Il boit trop, fume trop, ne dort pas assez. Il est hanté par ses fantômes (le Vietnam, son père, sa mère…), il n’aime pas qu’on lui dise quoi faire, il se sent investit d’une “mission”, chargé de rétablir la Vérité, au détriment bien souvent de sa carrière.

Il est flic, en Californie, et c’est Harry Bosch. J’ai lu le premier roman de la série cet été, et comme c’est du bon polar/noir, ça s’avale en deux bouchées. Et comme Harry est forcément très attachant malgré son mauvais caractère (et sa très mauvaise hygiène de vie) j’ai lu le suivant, et j’ai acheté les volumes 3 et 4. (même si Le Poète, quatrième roman policier de l’auteur, Michael Connelly, ne met pas en scène Harry Bosch, il fait quand même partie de la série, car le fameux “poète” réapparait plus tard, dans la vie du policier.)

Bref, avec ses descriptions d’Hollywood Boulevard et de ses ambiances interlopes, ses motels forcément miteux, ses flics qui carburent au café noir le matin et au whisky le soir, sa hiérarchie policière qui ne cherche qu’à augmenter ses statistiques de résolution de crime et à ne pas faire de vagues, l’univers de Connelly est l’archétype du polar noir américain…

Un dernier conseil : lire les romans dans l’ordre (la vie privée et la personnalité de Harry sont un peu plus creusées à chaque épisode, c’est dommage de revenir en arrière je pense), et surtout ne pas lire les quatrièmes de couverture, ni les articles sur internet (Wikipedia en particulier, à l’article Harry Bosch, balance des spoilers comme c’est pas permis !)

Le premier : “les égouts de Los Angeles”

Puis “la glace noire”

Et la “Blonde en béton”.

Categorie : livres
Par mes vies
Le
A 8:35
Commentaires :1
 
 

au violon

Mon “nouveau” violon est chez le luthier ces jours-ci. Le même luthier chez qui j’avais effectué mon stage “en entreprise” en troisième. (je n’ose même pas compter combien de temps ça fait. J’ai peur de trouver un résultat proche d’un vingtaine d’années…)

De nouvelles chevilles qui “tiennent”, un point de colle, le remplacement d’une attache-cordier en boyau par une en nylon, qui ne risque pas de lâcher du jour au lendemain, la pose d’un tendeur… et surtout, une nouvelle boîte, l’actuelle n’ayant pas de poignée…

La joie et l’enthousiasme que je ressens, d’avoir à nouveau un violon… Indescriptible ! (à peu près comme les sons que je vais en tirer…)

Categorie : moi
Par mes vies
Le 26 août 2011
A 19:35
Commentaires : 0
 
 

Nous étions les Mulvaney

« Nous étions les Mulvaney »

 

Deuxième roman de Joyce Carol Oates que je lis, après « Les Chutes » le mois dernier. Celui-ci plutôt qu’un autre, parmi les trente et quelques romans de cet auteur, parce qu’il était le seul disponible à la fnac de Perpignan, avec « Blonde », que je lirai aussi bientôt, mais qui m’attend dans la bibliothèque de mes parents.

 

J’ai retrouvé pas mal de points communs entre « les Chutes » et « les Mulvaney », des thèmes, principaux et secondaires, une façon de conduire la narration… Pour ce qui est des thèmes, on retrouve celui de la famille heureuse qui se disloque à partir d’un événement précis ; celui d’un récit qui englobe plusieurs décennies, de la formation d’un couple à la vie adulte de leurs enfants ; et si dans « les chutes », on évoquait les ravages de la pétrochimie, et les scandales de la pollution dans les années 70, dans les « Mulvaney », on peut lire comment, dans les années 70, la femme violée était perçue comme forcément fautive, coupable, même (et surtout) aux yeux de la justice.

 

Enfin, le débat entre les personnages qui opposent la théorie de l’évolution au créationnisme, déjà présent dans les Chutes (au tout début, entre le premier mari d’Ariah, collectionneur de fossiles, et son père), se retrouve dans les Mulvaney.

 

On entre d’abord dans ce roman par son titre. « Nous étions les Mulvaney ». (la traduction est littérale, le titre original est « We Were the Mulvaneys ».) Et dans ce titre, d’emblée, toute à la fois l’intense nostalgie, l’idée d’un temps révolu, et la fierté de l’appartenance, le sentiment de faire partie d’un clan plus encore que d’une famille.

 

Les Mulvaney, cette famille si soudée, si particulière. Ce patronyme revient à chaque page ou presque de ce roman ; accolé au prénom du père, Michael Mulvaney, ou à celui d’un autre membre de la famille, Corinne, la mère, Mike, Patrick, Marianne ou Judd, les enfants. Ou jeté à la tête de l’un d’eux, par d’autres personnages : « vous, les Mulvaney ».

 

C’est donc l’histoire de cette famille qui nous est livrée dans ces 700 pages, une histoire qui s’étend sur une quarantaine d’année, des années 50, où le couple parental se forme, puis achète la ferme de High Point Road, qui sera leur point d’ancrage pour les décennies à venir, jusqu’aux années 90, où est situé l’épilogue.

 

Judd, le plus jeune des enfants, est le narrateur. Du moins est-il le narrateur la plupart du temps. Mais il y a beaucoup de passages, un chapitre entier même, dans lesquels Judd est désigné à la troisième personne. Et le roman décrit de nombreuses situations qui soit précèdent sa naissance, soit, se déroulent en son absence. Le narrateur est à la fois narrateur omniscient, et narrateur-personnage, témoin de ce qu’il raconte. Dès le premier chapitre d’ailleurs, Judd explique qu’un « petit dernier » est aussi plein des souvenirs qui l’ont précédé, que des siens propres. Qu’à force d’entendre raconter une anecdote familiale, il finit par se persuader lui-même qu’il « y était », qu’il a ressenti les émotions de ce moment-là, celles qui lui parviennent par le biais du récit des aînés.

Et dans « les chutes », dans la dernière partie en tout cas, on retrouve un peu le même procédé : par moment, il semble évident que la fille d’Ariah est la narratrice, et à d’autres moments, elle est désignée par son prénom…

 

Mais ce qui est le plus intéressant, c’est la façon dont est conduite la narration. L’auteur tisse ensemble tout « l’arrière-plan » de la famille Mulvaney, l’histoire familiale, les portraits de chacun, diverses anecdotes qui nous rendent tout ce petit monde très proche, très incarné ; et un récit, le récit de ce qui arrive à Marianne en 1976, et qui fera basculer toute la famille dans le malheur.

 

Dès les tout premiers paragraphes, cette soirée de 1976 est évoquée, comme étant le tournant de l’existence des Mulvaney. Dès le troisième chapitre, on entre de plain-pied dans cet « évènement ». Pourtant, comme Oates imbrique et entrecroise sans cesse son récit avec des retours vers le passé, « l’histoire » des Mulvaney, il faut plus de 200 pages pour parvenir à « l’après » 1976.

 

Là où d’autres écrivains auraient raconté en suivant scrupuleusement la chronologie, un peu à la Laura Ingalls Wilder, Oates mêle constamment les époques différentes, parfois même parlant « du présent », un présent dans les années 90 (date de l’écriture du roman), dans lequel Judd est journaliste…

 

Une leçon de narration, selon moi, en plus d’une fresque sur l’Amérique “profonde” de la deuxième moitié du XXème siècle… J’ai adoré, c’est vraiment le genre de roman que j’aime lire, qui allie intrigue passionnante, tant sur le plan des personnages que sur le plan plus “général” (un pays, une époque…), et un vrai style littéraire, digne de ce nom, un style que l’on sent vraiment travaillé…

Categorie : livres
Par mes vies
Le 24 août 2011
A 19:32
Commentaires : 0
 
 

débarasse caves et greniers (et surtout les garages).

On trouve des merveilles dans les greniers. Enfin, il parait. Pourtant, on ne trouve plus rien dans les vide-greniers, toutes les chineuses vous le diront. (spécialement quand on considère comme un sacrilège de se lever avant 9h00 un dimanche.)

Donc, j’ai jeté mon dévolu sur les garages et les caves. Et bien m’en a pris. D’abord, la cave de ma belle-mère, de laquelle nous avons ramené une magnifique table ronde (goûtons voiiiiiiiir…) en vrai bois d’arbre, qui remplace avantageusement notre ancienne table (tout aussi ronde mais franchement branlante), en aggloméré massif, table “provisoire” depuis (ahem) décembre 2003. Comme quoi, tout vient à point, machin patin couffin.

Le seul (léger) hic c’est que de la table comme ça ma bonne dame, que c’est du massif, ça pèse un âne décédé, et c’est point démontable. Donc hop à bout de bras qu’on se l’est trimbalée, le GérardKlein et moi. Et c’est bête, mais à 10 pauvres cm près, elle rentrait pas dans la remorque. Mais vous imaginez bien que faire 1000 km avec une table pieds en l’air, posée sur le dessus de la remorque (et arrimée à icelle avec force tendeurs et sangles), ça nous fait pas peur.

Et sous la table, dans la cave(rne d’ali baba), il y avait un carton de vaisselle, d’une aïeule depuis longtemps n’en ayant plus besoin (par la racine, les pissenlits se mangent sans couverts.) Et dedans, ô merveille ! une série de verres. Et comme les verres, on n’en a jamais trop, hop, dans la remorque, sous la table, les verres. Les petits sont au complet (12), il manque un moyen, les grands ne sont plus que 6 et malheur de malheur, seules 3 flûtes sont parvenues intactes jusqu’à leur nouvelle destination. Tant pis, on s’en consolera.

Encore plus intéressant que les caves, il y a les garages. D’ailleurs une mienne cousine par alliance me disait comme je séjournais chez elle, “c’est fou le merdier qu’il y a, dans ce garage. Il y a vraiment de tout. J’ai même un violon !”. Et moi : “un violon ???? Alors que depuis 2 ans que le mien a été volé, je cherche désespérément à en retrouver un ?” (un qui ne soit pas un violon chinois à 50 euros avec la boîte et l’archet, on trouve ça, sur internet. Quand tu penses qu’en France un étui premier prix (vide) c’est 50 euros…)

Alors tu penses bien que la gentille cousine a pris son tabouret et m’a attrapé le violon qui dormait au-dessus du chiotte du garage depuis bien 25 ans. Et voilà. Le lendemain, j’envoyais GérardKlein m’acheter des cordes, je montais la bête, dont l’âme (collée par la crasse et un tout petit peu de moisissure) n’était même pas tombée. Un archet à 42 euros plus tard, et voilà, le petit violon retrouvait une voix (de chat qu’on égorge, vu que c’est quand même à peu près à ça que ça ressemble quand je joue, mais quand même.)

Le gentil luthier québécois qui exerce bien loin de sa belle province, à Perpignan, a confirmé ma première impression : un petit violon français, fin XIXème, pas de la meilleure façon, (le filet est assez grossièrement posé par endroits), donc vraisemblablement  un Mirecourt.

Et maintenant, pour vous récompenser de cette lecture fastidieuse, un petit MP3 de moi jouant la méditation de Thaïs.

(nan, j’déconne. Je ne vous veux aucun mal. Plutôt une mauvaise photo de mes jolis verres.)

Categorie : scène de la vie de famille
Par mes vies
Le
A 9:42
Commentaires : 3
 
 

vacances de luxe.

Après tout, le luxe, c’est un concept hautement relatif. Donc, selon mes propres standards, j’ai passé une semaine de luxe absolu. Jugez plutôt : une minuscule sous-préfecture du centre-ouest, loin de la mer, loin de la montagne (et même pas vraiment à la campagne non plus !). Un camping sans piscines à toboggan, sans animations, sans snack ni épicerie. Juste un peu d’herbe, des arbres, des sanitaires, et 25 emplacements, occupés exclusivement par des anglais (les propriétaires eux-même sont anglais et le site du camping est rédigé dans cet idiome.)

Une semaine, toute seule avec ma tente Quechua, ma pile de livres, et des vaches pour voisines immédiates. Pas de gosses, pas de GérardKlein, pas d’horaires, pas de repas à préparer, pas de linge à laver, pas de balai à passer. Une semaine à manger cru (j’avais même pas pris le camping gaz, le luxe, j’ai dit !! j’allais pas non plus faire la cuisine…), à devoir marcher 30 minutes pour accéder au premier café, et à lire entre 6 et 8 heures par jour.

À ce rythme-là, j’ai pas été aussi “productive” que j’aurais cru : j’ai fini Nous étions les Mulvaney (il me restait dans les 400 pages), lu La Chartreuse de Parme (que je n’avais jamais lu), Au Sud de la Frontière, à l’Ouest du Soleil, et presque terminé Du Côté de chez Swann. (oui, ça y est, je me suis jetée dans la lecture-fleuve de Proust. Et j’ai eu bien tort d’attendre aussi longtemps !).

Des billets en prévisions sur tout ça, mais en attendant : pour 79 euros TTC la semaine, j’ai du mal à croire que certains pensent le luxe hors de portée ? (OK, j’ai pas compté le prix des pommes et des tomates qui ont constitué la base de mon alimentation, ni celle des bouquins, mais même, je dois pas en être à plus de 100 euros.)

Categorie : Non classé
Par mes vies
Le 23 août 2011
A 16:49
Commentaires : 2
 
 

Juliette, nue.

(oui, on peut parfois sombrer dans la facilité pour générer quelques visites de plus sur son blog).

Il s’agit d’un roman de Nick Hornby, auteur du célèbre Haute Fidélité (que je n’ai pas lu mais sur lequel je vais me ruer).

Juliet, Naked, donc. Cette Juliet n’est pas l’un des personnages du roman. C’est le titre d’un album de rock, le dernier composé par Tucker Crowe, en 1986. Depuis cette date, Tucker vit “en reclus”, et ses quelques fans se perdent en conjectures sur internet, pour essayer de deviner ce qu’il fait, où il vit, et quelle expérience mystique a put le conduire à mettre fin à sa carrière.

L’héroïne du roman, Annie, est la compagne depuis 15 ans de l’un des derniers fans de Tucker Crowe.

Ce roman nous plonge dans la vie monotone d’une femme de quarante ans, qui dirige un minable petit musée d’une minable petite station balnéaire du nord de l’angleterre, ses désillusions, ses aspirations, ses micro-aventures…

On rit, on s’attache, on s’identifie… (moi en tout cas). Bref, une lecture agréable, distrayante… et, l’air de ne pas y toucher, avec le faux détachement tout british, quelques réflexions désabusées sur la vie qui passe, sur l’œuvre d’art, sur la “schizophrénie” de l’artiste, qui est d’un côté “monsieur tout le monde”, avec son fils de 6 ans, les réunions de parents d’élèves et les matchs de foot du dimanche, et de l’autre, le “créateur”, l’artiste romantique désincarné…

Categorie : livres
Par mes vies
Le 11 août 2011
A 15:30
Commentaires : 2
 
 

jeeves

C’est l’un de mes cousins qui me l’a fait découvrir. Outre-manche, Jeeves et Wooster sont aussi célèbres que Holmes et Watson, mais ici c’est une autre histoire. Personnages de l’extrêmement prolifique P. G. Wodehouse, Wooster est un jeune aristocrate anglais de l’entre-deux guerres, et Jeeves, son majordome. Wooster, qui n’aime rien tant que faire bamboche avec ses amis, a l’art et la manière de se fourrer dans des situations inextricables, d’où seuls le sang-froid et l’intelligence de Jeeves peuvent le sortir. Il faut dire que Wooster est constamment en proie à des oncles colériques, des tantes redoutables et de jeunes anglaises qui décident de l’épouser sans vraiment lui permettre de donner son avis…

Mais qu’il s’agisse d’aider un copain très maladroit, d’échapper à une harpie ou à un gendarme zélé,  Bertie Wooster ne se départit jamais de son humour.

Le style de Wodehouse est typiquement britannique, c’est à la fois les Monty Pythons et Blackadder, cet humour pince-sans-rire inimitable, que j’aime tant…

Et le cadre dans lequel se situent les romans de Wodehouse (l’aristocratie anglaise de la première moitié du XXème siècle), avec ses indispensables cottages à la campagne, son five-o-clock tea incontournable, ses jeunes gens énergiques, ses domestiques diligents, et sa douce oisiveté est délicieusement désuet.

Idéal pour se détendre, une lecture toujours rafraîchissante. Et quand on sait que Wodehouse a écrit plus de 90 livres, c’est autant de plaisir en perspective…

Un petit aperçu qui vous donnera, je l’espère, envie de faire un petit séjour à Steeple Bumpleigh en compagnie de Wooster et de Jeeves :

 

“-Mademoiselle Hopwood est venue quand Monsieur dormait encore, Monsieur.

-Vraiment ? J’aurais bien voulu la voir.

-Cette jeune dame eut souhaité pénétrer dans la chambre de Monsieur et faire lever Monsieur en se servant d’une éponge mouillée, mais je l’en ai dissuadée. Il valait mieux, à mon avis, que le repos de Monsieur ne fût point troublé.”

Et un autre :

“Quand, à peu près 18 mois auparavant, la nouvelle m’avait été transmise par des informateurs sûrs, que ma tante Agathe qui depuis des années était veuve - on l’avait quittée, comme on dit, pour un monde meilleur-, quand j’appris, dis-je, qu’elle était sur le point de faire une nouvelle incursion dans les terres du mariage, mon premier sentiment, comme c’était bien naturel en pareil cas, avait été une douce pitié pour le pauvre imbécile réduit à la conduire à l’autel. Car il s’agissait de ma redoutable tante qui est femme à avaler des tessons de bouteille et à organiser des sacrifices humains sous les rayons de la pleine lune”.

Categorie : livres
Par mes vies
Le 5 août 2011
A 18:05
Commentaires :1
 
 

promenons nous sur la montagne…

Tout le monde connait la collection de bouquins “Les Sentiers d’Emilie“, qui regroupent chacun 25 itinéraires de balades à faire en famille, faciles et accessibles. Faite ce jour, avec un bambin en sac à dos, Malo et Eléa à pied et un GérardKlein pas vraiment remis de son torticoli consécutif à son entorse de la cheville… Bref, une balade vraiment très agréable, avec juste ce qu’il faut de montée pour rendre la chose intéressante, et quelques ruines, chapelles et châteaux pour stimuler l’imagination des enfants.

Categorie : livres, photo, promenons-nous
Par mes vies
Le
A 13:12
Commentaires : 2
 
 

Grand siècle

Continuons dans les lectures estivales, avec la dernière en date : des extraits choisis des “mémoires” du duc de Saint-Simon.

Saint-Simon ? Lire Saint-Simon sur la plage et la terrasse, en plein été ? Quelle drôle d’idée, non ? Jusqu’alors, je n’avais lu de Saint-Simon que les quelques pages qui figuraient dans mes manuels de littérature et d’histoire, au lycée. Et je n’avais jamais, jamais, envisagé sérieusement de me plonger plus avant dans les dizaines de milliers de pages qu’a noircies le Duc au cours de son existence. Depuis longtemps, je me dis qu’un jour, je lirai “la Recherche”. Parce que bon, merde, il faut avoir lu “la Recherche”, dans sa vie. Depuis le lycée, également, je lis un Balzac par an, parce que j’ai envie de pouvoir dire en atteignant la retraite (si un jour je l’atteins) que j’ai lu toute la comédie humaine. Mais je doute fort que lire les mémoires de Saint-Simon in extenso soit à ma portée. Je n’en ai jamais eu l’ambition. Et pour que je le fasse il faudrait probablement que je sois parachutée sur une île déserte, seule avec les 8 volumes des “mémoires” dans la Pléiade.

Pourtant, fin Juin, je parcourais le hors-série “lectures d’été” de Marianne et du Magazine littéraire, et je ne sais plus quel critique recommandait une compilation d’extraits des “mémoires”, que l’universitaire (”spécialiste des mémorialistes”, il faut des spécialistes de tout, que voulez-vous) qui s’est chargé de la sélection a eu le génie d’intituler “cette pute me fera mourir…”. Et que voulez-vous, rien de tel qu’un bon marketting agressif pour vous donner immédiatement l’envie irrésistible de lire Saint-Simon.

Je me suis donc rendue à la Fnac, j’ai demandé avec beaucoup de naturel “Cette Pute me Fera Mourir…” à une vendeuse, qui m’a fait répéter deux fois pour être bien sûre.

En 450 pages (au lieux des dizaines de milliers de l’œuvre intégrale), on se fait une idée assez juste 1) du style extraordinaire de l’auteur et 2) de la vie à Versailles, sous la fin du règne de Louis XIV. Cette anthologie comporte des articles décrivant des évènements allant de 1691 (l’année où Saint-Simon fut introduit à la cour du Roi Soleil, La Reine étant morte depuis plusieurs années déjà, et Mme de Maintenon, maîtresse puis femme épousée en secret du roi, régnait sur son époux et sur tous les courtisans.) à 1715, mort de Louis XIV.

Si on peut souvent se laisser déborder par la généalogie ultra compliquée de la famille royale (Louis XIV avait un fils légitime, 5 bâtards, enfants de ses 2 premières maîtresses officielles, des petits enfants, des neveux, nièces et cousins, et tous, mariés entre eux.), on se laisse très facilement prendre dans toutes les descriptions que fait le mémorialiste des caractères, des intrigues, des ambitions, de tous ces gens-là. On y fait aussi la connaissance de courtisans assez extraordinaires, et on voit s’y dérouler des scènes drôles, affreuses, tristes, etc. Mieux qu’un sitcom.

L’extrait s’achève par ce que les spécialistes de Saint-Simon appellent le “tableau du règne” : à l’occasion de la mort du roi soleil, l’auteur revient sur ce que fut sa vie, son caractère, et décrit par le menu ses habitudes, son quotidien, tel que les courtisans dont Saint-Simon faisait partie, l’ont vécu.

C’est dans ces dernières pages que Saint-Simon rapporte que la Reine Marie-Thérèse, voyant le Roi s’afficher ouvertement avec sa maîtresse madame de Montespan (dont il aura 4 enfants), répétait “Cette pute me fera mourir…”.

Comme quoi, même les reines peuvent se montrer grossières !

J’ajoute qu’on peut trouver l’intégralité des “mémoires” en ligne, et qu’il existe des tas d’éditions qui en présentent des extraits choisis.

Ci-dessous, pour vous permettre de vous faire une idée de la plume acérée du Duc, et des personnages qui pouvaient se croiser à Versailles, un petit extrait qui m’a fait pousser des petits cris d’horreur…

“Cette princesse d’Harcourt fut une sorte de personnage qu’il est bon de faire connaître, pour faire connaître plus particulièrement une cour qui ne laissait pas d’en recevoir de pareils. Elle avait été fort belle et galante ; quoiqu’elle ne fût pas vieille, les grâces et la beauté s’étaient tournées en gratte-cul. C’était alors une grande et grosse créature, fort allante, couleur de soupe au lait, avec de grosses et vilaines lippes, et des cheveux de filasse toujours sortants et traînants comme tout son habillement. Sale, malpropre, toujours intriguant, prétendant, entreprenant, toujours querellant et toujours basse comme l’herbe, ou sur l’arc-en-ciel, selon ceux à qui elle avait affaire ; c’était une furie blonde, et de plus une harpie ; elle en avait l’effronterie, la méchanceté, la fourbe et la violence ; elle en avait l’avarice et l’avidité ; elle en avait encore la gourmandise et la promptitude à s’en soulager, et mettait au désespoir ceux chez qui elle allait dîner, parce qu’elle ne se faisait faute de ses commodités au sortir de table, qu’assez souvent elle n’avait pas loisir de gagner, et salissait le chemin d’une effroyable traînée, qui l’ont mainte fois fait donner au diable par les gens de Mme du Maine et de M. le Grand. Elle ne s’en embarrassait pas le moins du monde, troussait ses jupes et allait son chemin, puis revenait disant qu’elle s’était trouvée mal : on y était accoutumé.

Elle faisait des affaires à toutes mains, et courait autant pour cent francs que pour cent mille ; les contrôleurs généraux ne s’en défaisaient pas aisément ; et, tant qu’elle pouvait, trompait les gens d’affaires pour en tirer davantage. Sa hardiesse à voler au jeu était inconcevable, et cela ouvertement. On l’y surprenait, elle chantait pouille et empochait ; et comme il n’en était jamais autre chose, on la regardait comme une harengère avec qui on ne voulait pas se commettre, et cela en plein salon de Marly, au lansquenet, en présence de Mgr et de Mme la duchesse de Bourgogne. À d’autres jeux, comme l’hombre, etc., on l’évitait, mais cela ne se pouvait pas toujours ; et comme elle y volait aussi tant qu’elle pouvait, elle ne manquait jamais de dire à la fin des parties qu’elle donnait ce qui pouvait n’avoir pas été de bon jeu et demandait aussi qu’on le lui donnât, et s’en assurait sans qu’on lui répondît. C’est qu’elle était grande dévote de profession et comptait de mettre ainsi sa conscience en sûreté, parce que, ajoutait-elle, dans le jeu il y a toujours quelque méprise.

Elle allait à toutes les dévotions et communiait incessamment, fort ordinairement après avoir joué jusqu’à quatre heures du matin.”

 

 

Categorie : livres
Par mes vies
Le 3 août 2011
A 13:13
Commentaires : 0