… jusqu’au bac !!!
Quand Malo avait un an, deux ans, trois ans… son eczéma difficilement contrôlable nous conduisait à passer chaque année trois semaines dans le trou le plus paumé à l’est du Pecos, j’ai nommé : Avène. Pas d’internet, pas de téléphone portable, 3 chaînes de télé (dont France-trois Languedoc Roussillon), et pas de radio non plus (because les montagnes autour). Les douches, les bains, les massages, pour lui. Et pour moi : l’attente et l’ennui.
Puis, l’eczéma s’est très fortement atténué, Malo a grandit, Eléa est arrivée… je me croyais à l’abri. Quand il a commencé à jouer aux échecs.
C’est un truc, les échecs, qui peut paraître complètement inoffensif, comme activité. Ça coûte quasi rien : la licence est à moins de 20 euros, et le seul équipement dont on aie besoin, c’est (éventuellement) d’un jeu à la maison… On en trouve pour pas grand chose. (je veux dire : comparez ça au coût d’une année d’équitation en club… Quand il faut racheter une tenue complète chaque année, et payer une licence, plus des heures de cours qui coûtent un bras…).
C’est mieux que le foot, aussi, parce que les rencontres ont lieu à l’intérieur, c’est chauffé et à l’abri de la pluie.
Aux échecs, on ne risque pas de blessure, et les empoignades violentes au-dessus d’un échiquier ça n’existe pas vraiment.
Bref, ça peut paraître le sport idéal.
Tranquille, et tout.
Mais en fait, non.
Parce qu’en fait, des enfants qui jouent aux échecs en club, y’en a pas des masses. Donc, votre loustic de 5 ans à peine, qui sait tout juste pousser les pièces dans la bonne direction, on l’envoi aux championnats départementaux. Direct. Et bien sûr, une fois là-bas, il va se qualifier pour les championnats régionaux.
La première fois, je m’étais pas (trop) méfiée : les régionaux en question avaient lieu à quelques dizaines de kilomètres de la maison. Bon, certes, on partait de bonne heure le matin et on rentrait en fin d’après-midi, quatre jours de suite; mais ça n’était pas la mer à boire.
Non.
C’est l’année suivant que j’ai pris toute la mesure de la chose : les régionaux sont organisés chaque année par un département différent. Et la deuxième année, grâce aux performances de Malo, j’ai pu passer quatre jours à la Ferté-Bernard. (connue pour accueillir la plus grande aire d’autoroute de France. Sisi, j’vous jure.) Quatre jours à attendre le retour du guerrier en me rongeant les ongles, à boire du café dans des gobelets en plastique, à dormir dans un dortoir (j’ai légèrement passé l’âge, voyez-vous…), à manger à la cantine, à parler ELO, podiums, qualifications, à avoir des discussions du genre “Il joue demain contre un 1200, si X perd contre Y et que W gagne, il se qualifie, c’est jouable mais va pas falloir se laisser impressionner”…
Et cette année, c’est la riante ville de Laval, capitale de la Mayenne, où j’aurais cru ne JAMAIS mettre les pieds de ma vie, qui nous a accueillis pendant quatre jours…
D’un point de vue ethnologique, c’est passionnant.
Vous y côtoyez des parents-entraineurs, qui engueulent leurs enfants lorsqu’ils perdent une partie, qui les abreuvent de mauvais esprit (L’an passé, un gamin, d’un faux mouvement, fait tomber une pièce par terre. Sans la moindre hésitation, son adversaire (7 ans) appelle l’arbitre : “pièce touchée, pièce à jouer. Hein, il est obligé de jouer sa tour qu’il vient de faire tomber ????”…. ça vous laisse rêveur, une telle mentalité chez des enfants de CE1…)
À côté, on fait figure de doux amateurs, et nos enfants qui jouent aux toupies ou aux loups-garous entre deux “rondes” aussi… Ce qui ne les empêchent pas (tous) de réaliser de belles performances, par ailleurs…
Bref, aujourd’hui j’ai beaucoup de compassion rétrospective pour mes parents qui, chaque été, de mes 10 ans à mes 17 ans, ont passé 10 jours de vacances dans le Limousin, parce que je participais à un stage d’orchestre là-bas…