mes vies

blog multidirectionnel : mes vies de mère, de prof, de musicienne, de lectrice, de promeneuse, de dilettante en tout et spécialiste en rien… Et même mes vies de cuisinière, couturière et tricoteuse !

 

Tout ce que j’aimais…

(Voilà que ce blog va finir dans la catégorie “blog-lectures” !!)

C’était donc mon premier roman de l’américaine au nom à coucher dehors avec un billet de logement : Siri Husdvedt. Je ne sais pas pourquoi, je n’avais jamais vraiment entendu parler d’elle jusqu’à la parution de son dernier roman, Un été sans les hommes, dont j’ai pu lire quelques extraits qui m’ont donné très envie de le lire en entier.

Mais lors de mon avant-dernière visite chez le bouquiniste (ou peut-être même était-ce l’avant-avant dernière, c’est pas ma faute j’vous jure, il se trouve que sa boutique n’est pas très loin du conservatoire où je dois, 3 fois par semaine, patienter trois quart d’heure en attendant la fin de la leçon de violon ! faut bien que je m’occupe, non ??) il n’avait de Siri Husdvedt (oui je sais, je l’orthographie différemment à chaque fois. Statistiquement, je dois avoir la bonne graphie au moins une fois dans ce billet.) que cet épais volume, parut en 1999 : Tout ce que j’aimais, avec un morceau d’un tableau de Hopper en couverture.

Le roman se déroule à New York, entre 1965 et 1995 environ. Le narrateur nous invite à suivre son existence, à New York, dans le milieu des intellectuels et des artistes, que l’auteur connait bien. Nous suivons donc les destins de Leo, qui raconte l’histoire, un universitaire, prof d’histoire de l’art; de sa femme Erica, qui écrit sur la littérature des essais aux titres pompeux; de Bill Weschler, un artiste, peintre et plasticien, de sa première femme, Lucile, de sa muse et seconde femme, Violet, et de deux garçons, Matt, fils de Leo et Erica, et Mark, fils de Bill et Lucile.

Le livre est divisé en trois parties, trois “époques”, qui s’enchaînent les unes aux autres : dans la première, les couples se forment, les amitiés se tissent, les enfants naissent, les carrières s’envolent, et particulièrement celle de Bill, qui passe des tableaux figuratifs aux “installations” en trois dimensions, faites de caisses de bois ou de cubes de verre.

Les deux jeunes garçons sont les personnages centraux des parties 2 et 3. Matt, le fils du narrateur, disparait tragiquement à l’âge de 11 ans, et toute la partie 2 est consacrée à la déliquescence du couple Leo-Erica, à l’impossible deuil. Dans la troisième et dernière partie, Mark, le fils de Bill, devenu un jeune adulte, n’en finit plus de mal tourner, fréquentant un artiste underground aux pratiques borderline…

Le titre, “Tout ce que j’aimais”, n’est pas l’exacte traduction du titre original, What I loved, qu’on traduirait simplement par “ce que j’aimais”. Ce “tout ce que j’aimais”, c’est aussi les paroles d’une chanson d’Alain Souchon, “j’ai perdu tout ce que j’aimais”, chanson qui tournait en boucle dans ma tête pendant la semaine où j’ai lu le livre. J’ignore s’il s’agit d’une volonté délibérée de Christine Le Bœuf, traductrice de Siri Husdvetd (et de Paul Auster et de bien d’autres auteurs américains parus chez Actes Sud, dont Alberto Manguel), mais en intitulant le roman “tout ce que j’aimais”, le “j’ai perdu…” manquant devient (pour moi, dont la culture souchonnesque dépasse de loin la culture livresque) comme fluorescent.

Et c’est bien de perte, de deuil et de dépouillement dont il s’agit, tout au long de cet ouvrage, que j’ai trouvé très beau, nostalgique et profond, malgré des choses très agaçantes (comme les descriptions détaillées des œuvres de Bill, du travail de recherche de Violet sur l’hystérie et les troubles du comportement alimentaire…). Le narrateur perd son fils, voit son couple se défaire, ses illusions l’abandonnent, il se retrouve à la fin absolument seul, perdant la vue de surcroit, comme si, sa tentative de ne pas voir la vérité en face ayant échouée, son corps se mettait à lui cacher le monde.

C’est un livre que j’ai trouvé bien plus intéressant et plaisant à lire que les derniers Paul Auster… Peut-être aussi parce que je lis tous les romans de Paul Auster depuis que je suis au lycée, et que donc une certains lassitude s’est installée : il écrit toujours les mêmes histoires, revisite les mêmes lieux, les mêmes thèmes… Sans doute de façon un peu trop semblable au fil des livres, et moins profonde aussi : comme si dans ses premiers ouvrages (Trilogie new-yorkaise, La Musique du hasard, Léviathan, qui sont ceux que j’ai lu en premier, et dont je me souviens le mieux, paradoxalement), le lecteur devait faire lui-même le travail, trouver les liens, les clés, alors que dans ses romans plus récents (Seul dans le noir, le dernier que j’ai lu, j’ai un peu de retard, mais la fièvre qui m’habitait quand j’avais 20 ans et qu’Auster sortait un nouveau roman m’a quittée) tout est là, prévisible, cousu de fil blanc…

Categorie : livres
Par mes vies
Le 25 octobre 2011
A 15:03
Commentaires : 4
 
 

crin-crin

Voilà, Malo est rentré vendredi de son cours de violon avec son petit demi. Au premier regard, je l’ai tout de suite trouvé louche. D’abord, absolument dégoûtant. Des traces de doigts bien grasses partout. Des restes de colle sur la touche (là où le précédent prof avait dû coller les petits scotchs qui indiquent où placer les doigts…).

Les cordes plus qu’usées… Deux cordes à changer en urgence, deux autres vraiment fatiguées. Une mentonnière en plastique (alors certes, je vous l’accorde, un élève qui prend un demi-violon ne va vraisemblablement pas travailler 2 heures par jour, et donc même avec une mentonnière en plastique, il y a peu de risques qu’il se face un abcès au cou, mais bon… Même en 10 minutes, on sent bien la différence entre le contact de l’ébène et celui du plastoque.)

L’attache-cordier en boyau : le truc qui, forcément, un jour ou l’autre, va péter. Et donc envoyer valdinguer toutes les cordes, le chevalet, et l’âme.

Mais bon, un violon d’école de musique, on ne va pas trop faire la fine bouche. Le violon est dans une boîte pourrie, décollée, déformée, dans laquelle il faut appuyer “bien fort” pour faire entrer le violon… (sic. Le genre de truc que je ne dirais pas, personnellement, à un garçon de 7 ans. Parce que pour appuyer “bien fort”, il appuie “bien fort”. Si il pète le violon en essayant de le loger dans sa boîte, faudra pas venir se plaindre…)

Et, cherry on the cake, on vous loue le violon, mais il faut acheter l’archet. Le prof nous envoie au magasin de musique de la ville, où on trouve des archets “à 25 euros”. Ahem. Le prix d’une mèche, c’est 50 euros. L’archet qui vaut moins cher qu’une mèche, c’est donc mathématiquement impossible. “Si si, ce sont des archets chinois. Mais bon, pour débuter…”.

Oui mais non. C’est trop pour moi. Du coup, ce matin, 30 minutes de train et 5 minutes de tramway, me voilà rendue dans l’atelier de mon luthier préférée. (le e n’est pas une coquille, mon luthier préférée est une femme luthier.)

Je lui montre l’engin, lui expose mes réticences, et lui demande un demi-archet.

Et là, outre tous les menus détails que je lui avais désignés, elle me montre le “gros” problème de ce violon : la touche est décollée, sur 15 cm environ. L’instrument n’est donc pas jouable…

Je lui ai loué un demi-violon, en parfait état, avec une boîte propre, des cordes neuves, un archet à la mèche neuve,  pour environ 30% plus cher que ce que ça me couterait à l’école de musique pour un instrument pourri… (et un an de location = pas loin du prix de l’archet, or qu’est-ce que je fais de mon archet 1/2 quand Malo passera au 3/4 ??)  Sachant que lorsque je lui achèterai un violon (si Malo continue le violon), un trimestre de location par année de location me sera déduit de mon achat. Alors certes, 40 euros, ou même 80 si on loue deux ans, sur le prix d’un Guarnerius del Gesù ou d’un Vuillaume comme celui de Hilary Hahn (mon idole du moment), c’est peu; mais 80 euros c’est le prix d’un archet français “premier prix”…

Bref, le violon chinois (ou l’archet chinois) ne passera pas par moi. Je refuse d’acheter un archet chez un marchand de musique qui ne sait ni comment l’entretenir ni comment le réparer en cas de problème. Je refuse d’acheter un violon ou ses accessoires chez un “marchand”.

Et je persiste à croire que le premier plaisir du violoniste, c’est de tenir dans ses bras un objet magnifique, de le traiter avec tous les égards qu’il mérite, de se dire que celui qui l’a fabriqué de ses mains y a mis tout son cœur, tout son savoir-faire.

En même temps qu’on me prêtait mon premier violon (j’avais 13 ans) j’ai lu Les Violons du roi de Jean Diwo : c’est la biographie (romancée, très romancée même) d’Antonio Stradivari (dit Stradivarius). C’est passionnant, même sans forcément s’intéresser au violon (je ne pense pas que Jean Diwo soit musicien ni particulièrement mélomane). Il raconte l’histoire d’un artisan, dans la Crémone du XVIIIème siècle, qui a révolutionné son art, sans réellement l’avoir projeté, seulement par amour de son travail, amour du bois dans lequel il sculptait ses violons, désir d’atteindre la perfection… Cette lecture et mon stage de 3ème dans l’atelier de mon luthier préférée m’ont pour toujours envoutée, et pour moi, un violon n’est pas un simple objet, mais il a une dimension presque sacrée…

Categorie : scène de la vie de famille, livres, musique
Par mes vies
Le 1 octobre 2011
A 19:39
Commentaires : 2