politique
Ce soir, comme dimanche dernier, comme tous les dimanches soirs électoraux de ma vie, ou quasiment, j’étais au dépouillement.
Que je dépouille moi-même (comme ce soir), ou que j’assiste seulement à la manœuvre, c’est un moment que j’aime.
Pourtant je ne crois pas, ne crois plus du tout, qu’il puisse sortir de ces enveloppes une solution, une réponse, un changement.
Mais j’aime voir les gens qui dépouillent.
Ces gens qui ont consacré une des vingt-trois heures de leur dimanche à ouvrir des enveloppes et à faire des petits bâtons sur les points.
À compter, puis à recompter.
Des gens qui sont sérieux, concentrés, appliqués.
Des gens qui n’ont pas de responsabilités, pas de diplômes, pas de discours tout fait.
Des gens de bonne volonté.
Et je les regarde et je me dis voilà, les hommes et les femmes politiques, les vrai-e-s, c’est eux. Ils ne sont là ni pour la gloire ni pour le pouvoir, ils sont là par devoir, par conscience, parce que quelqu’un doit le faire ce travail, et quand on leur a demandé s’ils étaient disponibles, ils ont dit oui. Oui pour venir à 18 heures, oui pour compter des enveloppes, oui pour s’appliquer et écrire dans les cases, oui pour la tâche monotone, oui pour le verre de jus de pomme et la boîte de biscuits partagés à la fin.
Ils sont venus là, ils n’ont pas que ça à faire sans doute, et ils ne croient pas tellement à la “politique”, non plus. Mais ils croient à la démocratie. Aux vrais gens qui travaillent ensemble, aux gens de bonne volonté.
À vingt heures ils sont rentrés chez eux pour regarder à la télé la carte de France colorée. Ils savent que c’est un peu grâce à eux.
Mais maintenant plus personne ne leur demandera plus rien jusqu’aux prochaines élections. Maintenant les “hommes politiques”, les “partis politiques” vont faire semblant de les connaître et de parler en leur nom, cachant mal le fait qu’ils ne veulent qu’une seule chose : le pouvoir.
Alors les dimanches soirs électoraux je me prends à penser, à imaginer à quoi ressemblerait le monde si on laissait ces gens là, tous ces gens, les gens de bonne volonté qui ne cherchent ni la gloire ni la reconnaissance ni le pouvoir, si on les laissait tous ensemble gouverner.
Si on vivait dans une démocratie, quoi.