mes vies

blog multidirectionnel : mes vies de mère, de prof, de musicienne, de lectrice, de promeneuse, de dilettante en tout et spécialiste en rien… Et même mes vies de cuisinière, couturière et tricoteuse !

 

De Naouri à l’égalité des chances…

Vous n’êtes peut-être pas sans savoir que M. Aldo Naouri vient de nous pondre un nouvel opus, dont vous pouvez avoir un aperçu ça et … Je ne reviendrai pas en détail sur les “conseils” que nous assène ce pro des enfants : “Ne doutez jamais” (Descartes, prend ça dans ta face), “A deux ans, on prend le doudou et la sucette et on les met à la poubelle sans aucune explication” (et moi je vais venir chez toi, et mettre à la poubelle ton camembert et ton jambon. Comme ça, arbitrairement. C’est pas bon pour toi de toutes façons.) “Si votre enfant vous pose des questions sur la sexualité, répondez-lui de se trouver un copain ou une copine pour lui fournir les explications qu’il réclame. On ne doit pas parler de sexualité avec ses enfants.” (sans commentaires…)

Mais il y a une phrase dans son interview à ELLE que je voudrais commenter :

ELLE. Nous étions déjà traumatisés par le fameux : « Tout se joue avant 6 ans ». Aujourd’hui, vous nous dites que c’est avant 3 ans que tout se jouerait !
ALDO NAOURI. Je ne raconte pas du tout ça ! Je suis parti d’un état de fait : chaque année, 60 000 enfants quittent l’école avec moins de 500 mots de vocabulaire. Alors, je dis aux parents : « Eduquez vos enfants, et, ensuite, l’effort qu’ils auront à faire à l’école sera beaucoup moins difficile pour eux. » Comme, en France, l’école commence à 3 ans, il est fondamental de délivrer le plus gros de cette éducation avant la fin de la troisième année.

(je passe sur “l’école commence à trois ans”, qui est peut-être une vérité “de fait”, mais qui occulte le fait que 1) l’école n’est pas obligatoire (mais l’instruction, si), et 2), c’est seulement à partir de 6 ans. Mais bon, c’est vrai qu’une grande majorité d’enfant va à l’école à 3 ans.)

Revenons sur son « Eduquez vos enfants, et, ensuite, l’effort qu’ils auront à faire à l’école sera beaucoup moins difficile pour eux. ».

Ben oui, je suis à 100 % d’accord avec ça, dans le sens où un enfant qui vient d’un bon milieu culturel, à qui on lit des livres, qu’on emmène au spectacle, ou visiter des musées, des monuments, qu’on “sort” tout simplement, et à qui on parle, on explique le monde, un enfant dont les parents ont une vie culturelle riche (et un vocabulaire important) entre en effet à l’école avec de bien meilleures chances de réussite que l’enfant d’une famille où la seule pratique culturelle est la télé, et où on utilise un vocabulaire ultra réduit… Mais à quoi ça sert de dire à une famille très défavorisée “Donnez beaucoup de vocabulaire à votre enfant, ça l’aidera à l’école” ? S’ils le pouvaient, ils le feraient, non ???

Et, cas inverse, je ne connais aucune famille avec un bon niveau culturel qui ne fasse pas partager ses pratiques culturelles à ses enfants !

Je me souviens, il y a quelques années (dix ans au moins !) avoir entendu un philosophe (il  me *semble* que c’était Luc Ferry…) sur France Culture, parler de l’école, dire que l’école était “l’exotisme”, qu’elle avait pour mission de sortir l’enfant de son milieu, de l’aider à s’évader vers els hautes sphères de l’esprit…

Tout ça c’est très beau en théorie, mais si on y regarde de plus près, que voit-on ? Les enfants qui réussissent le mieux à l’école, ce sont les enfants d’enseignants. Pourquoi ? Justement parce que pour eux, l’école n’est pas l’exotisme ou l’évasion, mais le prolongement de leur “culture” familiale.

Ces réflexions pas  très optimistes pourraient me conduire à penser que l’école ne sert à rien… Que tout est joué -tout se joue- au sein de la famille.

Mais alors, j’ai envie de dire à Naouri et aux autres : inutile de dire : “parents, éduquez vos enfants “, tous les parents éduquent leurs enfants à la mesure de leurs possibilités. Ce qu’il faut faire, c’est plutôt éduquer les parents, leur donner les moyens d’aider au mieux leurs enfants. Et ensuite, tout faire pour rendre à l’école son vrai rôle : instruire tous les enfants qui lui sont confiés, leur permettre à tous d’apprendre à apprendre.

Je suis convaincue que l’intérêt de l’école ce n’est pas le contenu des programmes (demandez-moi ce dont je me souviens de mon programme de bio de seconde : on a disséqué une blatte. C’est maigre, vu le nombre d’heures que j’ai passées en cours de bio !), mais c’est de susciter l’intérêt, la curiosité de l’élève, et de lui donner les moyens de chercher (et de trouver) lui-même les réponses aux questions qu’il sera amené à se poser au cours de sa vie. De penser par lui-même, d’exercer son libre arbitre et son esprit critique. (relisez Naouri : pour lui, on doit donner des ordres aux enfants, sans la moindre explication, et ils doivent obéir sans poser de question. Pour moi, c’est comme ça que j’envisage mes rapports avec mon chien. Mais pas avec un autre humain, même si ce dernier n’est âgé que de 4 ans ! ou deux ans ! ou même un mois !!!)

Toutes ces réflexions car en ce moment je suis amenée à beaucoup cogiter sur notre choix de scolariser Malo : en effet, autour de moi presque aucun enfant n’est scolarisé, et dernièrement j’ai assisté à une réunion ayant pour thème “pédagogies alternatives”, et il y avait un monde fou, un nombre incroyable de parents (et même de futurs parents) qui étaient là, car ils se posent des questions sur le rôle de l’école, le choix de scolariser ou non ses enfants, dans une école “traditionnelle” ou une école à “pédagogie alternative”.

Je trouve très bon signe que tous ces gens se posent des questions sur le système scolaire, sur l’école, la pédagogie, l’instruction… Je m’en pose aussi, énormément, mais ma réponse n’est pas, pour l’instant du moins, l’instruction en famille.

Parce que si on pousse le raisonnement jusqu’au bout :

- les enfants qui viennent d’un milieu culturel riche n’ont pas besoin de l’école pour apprendre, s’instruire, se cultiver. Les parents de ces milieux là qui en ont le souhait gardent donc leurs enfants à la maison et pratiquent l’instruction en famille, qui selon moi donne (dans ces conditions là) de très bons résultats, à savoir que l’enfant s’instruit, se cultive, tout en ayant une vie respectueuse de ses rythmes, de sa personnalité.

-Mais quid des enfants issus de milieux culturels défavorisé ? Ceux-là restent à l’école, dont ils ne peuvent pas  tirer grand chose car ils n’ont pas les pré-requis (en particulier un langage riche).

Alors on irait à terme vers une société où l’école serait faite uniquement pour les enfants dont les parents n’ont pas la capacité de les instruire ? Une école réservée aux enfants avec 500 mots de vocabulaire ? Aux enfants des familles qui ignorent ce ce qu’est l’impressionnisme, qui sont Wagner et Homère ?

Alors je ne sais pas trop comment je peux agir là dessus. Je ne sais pas trop comment faire pour que chaque enfant puisse bénéficier du meilleur à l’école et dans sa famille. Je ne sais pas comment faire pour que “l’égalité des chances” devienne une réalité, et pas une douce utopie.

Mais j’adhère à une association de parents d’élèves (fcpe), et je suis assez fière de dire que cette association organise à l’école de notre village (enfin le village d’à côté… L’école de Malo, quoi) des réunions avec les enseignants autour de la violence, pour leur permettre de trouver des solutions pour y remédier… Les enseignants ont d’ailleurs reçu des mallettes pédagogiques et des jeux coopératifs, payés par la dite associations de parents d’élèves.

Ce n’est peut-être pas grand chose, mais ce type d’action me semble capital.

Il est surement encore loin le jour où l’école ser respectueuse de chaque enfant et lui permettra d’accéder au meilleur de lui même. Mais j’y travaille… Je le fais pour mes enfants, bien sûr, mais surtout pour ceux dont les parents ne peuvent pas leur offrir tout ce que moi j’ai la chance d’avoir hérité, et donc de pouvoir transmettre.

Pardon pour ce long post indigeste… Mais ça fait très longtemps que tout ça tourne dans ma tête. J’aurais voulu organiser un peu mieux ma réflexion (il parait que c’est à ça que ça sert, écrire !!),  mais bon…

J’ajoute que j’ai démarré ce blog il y a deux ans et quelques, après avoir laissé un long commentaire sur le blog de Maman Zèbre, en réponse à un de ses billets sur la non scolarisation…  Déjà ce sujet me donnait envie de m’exprimer !

J’attends avec impatience vos remarques z’et commentaires :)

Categorie : education
Par mes vies
Le 2 avril 2008
A 20:33
Commentaires :
 

5 Comments for this post

 
Angsoka Says:

J’ajouterai qu’au sein d’une même famille en fonction de l’enfant comme des évènements, l’apprentissage ne se fait pas de la même façon… Et je pense qu’il y aurait un gros travail à faire sur l’humiliation des enfants par leurs parents : “tu vois, ta soeur elle y arrive facilement, pourquoi pas toi ?”… Il y a apprendre à apprendre et donner l’envie d’apprendre.
Mais bon, j’ai trouvé ton article très intéressant ! Et comme toi, si je me lance, je pense que j’ai pas mal de choses à dire sur le sujet, donc je m’arrête là ;o)

 
 
Julotte Says:

Je retrouve tout à fait mes interrogations dans ton billet. Mon problème face à l’école est partiellement résolu par le fait que l’école Diwan de mes filles respecte vraiment les enfants et leur apporte une richesse (une langue supplémentaire) que l’éducation à la maison ne pourrait pas leur donner.

 
 
Cécile Says:

Travaillant dans l’éducation populaire, j’ai absolument souhaité que ma fille aille à la crèche dès 3 mois ( 4 jours par semaine )afin de compléter l’éducation qu’on allait lui donner.

Je parle beaucoup à ma fille, je lui achète et lui lis des livres, des imagiers, nous lui faisons écouter de la musique et nous jouons beaucoup avec elle. Cependant je voulais aussi qu’elle apprenne des autres, la crèche que nous avons choisi répond à toutes nos attentes.
Par ailleurs, j’angoisse déjà pour l’école…j’ai trop travaillé en CLAE dans ma commune je connais l’intérieur des classes pas le sourire de la maitresse devant les parents, j’ai trop vu de choses: des petites tapes, des humiliations, des gamins pas changés, par mouchés pendant des heures, d’ailleurs j’ai démissioné car je n’arrivais pas à faire changer les choses….
Dans les grandes villes, les parents ne sont plus bénévoles : la FCPE ou ALPE ou autres ont du mal à trouver des volontaires, personne ne vient aux réunions…

Je réfléchis à une école de type Montessori pour Noémie bien que son père ne soit pas d’accord…

Bref moi aussi je m’interroge !!!

Merci pour ce post !!!

 
 
anne-so Says:

Merci pour cet article. Nous aussi, nous nous interrogeons beaucoup ! Arthur a débuté son année scolaire à la maternelle publique près de chez nous. Nous avions envisagé une école alternative mais financièrement (je suis installée à mon compte depuis peu), nous avions un peu peur de ne pas suivre. Finalement, au bout de 2 mois 1/2, il ne voulait plus y aller et la maîtresse a fini par annoncer qu’elle le pensait “dépressif” !!! Jamais auparavant, elle n’avait évoqué quoi que ce soit. Bref, il a quitté l’école début décembre et en janvier, il est rentré dans un jardin d’enfants Waldorf/Steiner : le pied !!! Les enfants et leur rythme sont pris en considération, petits effectifs… il est bien loin d’être dépressif !!! ;-)
Maintenant, notre inquiétude, c’est que notre déménagement en province va encore le faire changer d’école et qu’il n’y a aucune école alternative là où nous allons… donc la désco (autour de nous, ici, en RP, il y en a pas mal) nous fait réfléchir…

 
 
hafsa Says:

moi qui n’ai pas d’enfants (donc ca vaut ce que ca vaut) je me dis que c’est tres important que les enfants aient l’occasion de grandir ensemble, de rencontrer d’autres enfants tres differents d’eux, d’avoir une idee d’une vie differente de celle qu’ils connaissent dans leur famille.
sinon le naouri la, y aurait pas des relents odeologiques dans ses delires…

 

Leave a Reply

You must be logged in to post a comment.